Les prix augmentent, ensuite les salaires. Encore et encore. Si ce n’est pas la COVID-19, l’Ukraine, le climat, le fret, le cours du pétrole, le dollar, le gaspillage, les abus ou les mauvaises décisions, ce sont alors les marchandises qui n’arrivent pas et les pénuries… jus qu’au x poules qui ne pondent pas, ici même. Et les prix augmentent. Ensuite, les salaires augmenteront . Mais serons-nous satisfaits, enfin ?
INSATISFACTION
L’insatisfaction ressemble à un cycle interminable, un cercle vicieux même. Et nous n’avons pas besoin de sondages chaque mois pour comprendre que ce sentiment vise autant le gouvernement que l’opposition, autant des institutions locales que les instances internationales. Dans le pays, par exemple, les Mauriciens ont de moins en moins confiance dans les institutions religieuses. Au plan global, la crédibilité des Nations Unies est remise en doute. Malgré les multiples verdicts de ses propres cours de justice internationale, les massacres continuent à Gaza.
Sommes-nous satisfaits des autres ? Difficile question et impossible de généraliser. Mais combien de parents ne sont-ils pas insatisfaits de leurs enfants, d’employeurs de leurs employés, de voisins de leurs voisins ? Et vice-versa ? Et la liste est longue. Certes, la rigueur, l’objectivité et le sens d’équité doivent prévaloir lorsque nous mesurons notre satisfaction, mais finalement n’est-ce pas dans notre coeur que repose notre contentement, ou non, vis-àvis des autres ? Sommes-nous également satisfaits de nousmêmes ? Suis-je satisfait de moi-même, en mon âme et conscience ?
Il arrive que nous soyons très insatisfaits des autres, mais facilement et rapidement satisfaits des siens, et de soi-même. Le contraire est assez rare. Les attentes, les exigences et les critères ne sont pas toujours les mêmes. Nous sommes à géométrie variable, choisissant d’être inflexibles ou compatissants, quand cela nous convient. Lorsque nous prenons nos désirs pour nos dieux, la satisfaction n’a plus aucune signification.
ILLUSION
Autant y a-t-il une confusion autour de ce qui satisfera tout le monde, par t icul ièrement dans une société plurielle en mutation comme la nôtre, autant y a-t-il une épreuve intime pour chaque être
afin d’avancer vers sa satisfaction personnelle. Avec la perte des valeurs humaines, l’échec du système éducatif, le consumérisme et le culte du plaisir que véhiculent les modes et moyens de communication, la satisfaction risque d’être une illusion éphémère. Les augmentations de prix et de salaires, presque en boucle sans apporter de satisfaction, ne cachent-elles pas au fond une crise beaucoup plus grave qui repose au fond de notre conscience ? Individuellement, mais aussi collectivement.
Certes, il y a des actions pragmatiques et terre à- terre qui apporteront des solutions réelles à nos problèmes. Pour avoir des oeufs, il faut des poules, évidemment. Il ne nous faut surtout pas songer à importer des oeufs. Concrètement, notre insatisfaction découle trop de notre dépendance matérielle sur l’importation de produits dont on a besoin, et de tant de choses superflues. Notre satisfaction augmentera quand notre autonomie augmentera, car nous dépendons trop des autres et ceux-ci en profitent trop souvent. Il y a aussi une culture grandissante qui laisse croire qu’il faut réussir sans faire des efforts.
Pour citer quelques mesures évidentes mais pas si complexes afin de satisfaire le bien commun, il nous faut une gouvernance plus efficace misant sur la méritocratie, et non la médiocrité. Moins de centralisation, d’autoritarisme et de bureaucratie. Davantage de proximité, de transparence et de professionnalisme. D’éthique, surtout plus d’humanisme. Or, sommesnous totalement satisfaits que changer de gouvernement, de personnes, ou même de système, nous donnera… satisfaction ?
Il est dit que si un homme possède une vallée remplie d’or, il voudra bien en avoir une deuxième. Rien ne remplit sa bouche sauf la terre de sa tombe. Certes, cela ne signifie nullement que la cherté de la vie ne mène pas à une souffrance humaine. Encore moins que nous devons subir passivement notre sort quand il y a injustice. Au contraire, ce que nous devons comprendre c’est que
notre égo sera insatiable si nous nous laissons aller. Que plaire aux autres n’est pas, non plus, le but de notre vie. Nous pouvons nous contenter de peu, sinon de bien moins que ce que nous désirons, si nous ne cherchons pas à faire comme les autres aveuglément.
CONCLUSION
Si une chose nous est destinée, nous l’aurons. Autrement, quoi qu’on fasse, nous ne l’aurons pas. Or, nous sommes ignorants du destin…c’est ce qui fait de nous des êtres libres avec le devoir de faire des efforts sincèrement, patiemment et intelligemment. Il faut agir selon les bons principes, faire de notre mieux, vraiment. Cette responsabilité est le contraire d’une attitude qui nous pousse à la malhonnêteté, à demander sans aucune dignité à droite et à gauche, à dépendre paresseusement des autres, à tomber dans l’assistanat sans chercher à s’en libérer. Notre résistance contre le mal et pour le bien découle aussi de ce refus de tout renoncement, même lorsque les hommes ne nous inspirent que du désespoir.
L’insatisfaction n’est-elle pas le résultat d’être esclave d’une ou de plusieurs autres personnes, et de choses si mondaines, alors que notre aspirationinnée est d’être libre de tout ? Sauf pour l’être
de foi qui ressent qu’il n’a besoin, dans l’absolu, que de Celui qui n’a besoin de rien et Dont toute la création dépende. Celui qui cherche finalement à satisfaire seulement Le Créateur n’est-il pas celui qui trouve la paix ? Si être satisfait du Créateur est facile lorsque le sens de sa vie et de sa mort est clair pour un croyant, atteindre le plaisir divin, par contre, est tout un cheminement. L’épreuve est aussi de distinguer la finalité des moyens, comprendre que ce n’est que Dieu Qui donne et Qui prend, tout le reste n’a aucun pouvoir dans l’absolu. L’insatisfaction est garantie lorsque nous prenons une ou des créatures pour le Créateur.
Alhamdoulillah. Cette expression est très connue dans les religions monothéistes, mais elle est également universelle, intemporelle même car elle nous lie à l’Au-delà. Nous le disons comme réponse lorsqu’en kreol morisien, ici, nous est demandé « Ki position ? ». Il nous faut le prononcer avec toute sa signification du plus profond du coeur afin de ne plus être insatisfait. Car, c’est une parole de reconnaissance de pure vérité qui nous retourne vers Dieu, satisfaits de Lui. Afin qu’Il Se tourne vers nous, qu’Il soit satisfait de nous. C’est la satisfaction suprême que nous devons chercher.